La déclaration FSU au CTA conjoint des académies de Lille et Amiens, le 17 février 2021
La carte des formations initiales sous statut scolaire est chaque année, un moment important du service public d’éducation, au service de la formation des jeunes. Pour les personnels des lycées publics, il s’agit de préserver la qualité du système éducatif public accessible à tous, sans aucune discrimination et sans a priori social. Pour un lycée, avec la demande d’ouverture d’une formation professionnelle, il y a la volonté de montrer le dynamisme de l’établissement et surtout de permettre au plus grand nombre d’accéder à des formations professionnelles plus qualifiantes dont nous reconnaissons tous la nécessité pour l’accès à l’emploi des jeunes. Chaque année, plus de 200 dossiers d’ouverture sont déposés, témoignant du dynamisme des équipes de direction et d’enseignants et la volonté d’adaptation d’un système éducatif que certains veulent décrire comme peu réactif.
La FSU ne peut constate entre nos 2 académies un déséquilibre d’ouvertures de formation : Quand à Amiens on ne compte que 7 ouvertures, dont 2 en 2022, on en compte 36 pour l’académie de Lille !!
Une fois de plus, l’académie d’Amiens est lésée avec une carte des formations qui ne permet plus aux jeunes de se former au plus près de chez eux avec un choix qui ne soit pas par défaut, qui mènerait à un décrochage certain et croissant !
En outre, l’Éducation Nationale est mise à mal. A la rentrée de septembre 2021, 1 800 postes seront supprimés dans le 2nd degré alors que les effectifs d’élèves augmentent encore. L’avenir n’est guère plus enthousiasmant à la vue du nombre de postes ouverts au concours d’enseignement.
La carte des formations proposées est une illustration du manque d’investissement de l’État dans la formation professionnelle initiale : les ouvertures sont corrélées aux fermetures. A noter que pour les formations de BTS, 5 ouvertures ont lieu dans l’enseignement public et 4 dans l’enseignement privé, malgré le fait que l’enseignement public représente une part beaucoup plus importante de jeunes.
Sur les dossiers retenus, nous ne connaissons toujours pas les raisons qui ont prévalu au choix définitif positif ou les refus des demandes formulées: un manque de moyens de l’Éducation Nationale ? Un manque de financement de la région pour les infrastructures ? Une offre de formation déjà trop importante dans la branche professionnelle, sous statut scolaire ou en apprentissage ? Par exemple au lycée Marie Curie de Nogent-Sur-Oise, l’ouverture d’une section de sciences économiques et sociales se fait à moyen constant et implique la suppression d ‘un groupe du BTS CPRP à 2 options a/ et b/ qui hypothèque gravement la poursuite de ce BTS. Les personnels du Lycée Paul Duez de Cambrai étaient également dans l’attente de la possible ouverture d’un BTS Sciences du Numérique, à moins que l’étude de la situation n’ait eu pour but que de faire patienter les personnels sans réelle perspective d’ouverture.
La FSU avait souligné la nécessaire consultation des organisations syndicales de l’Éducation nationale lors d’un GT après les décisions actées au niveau du CREFOP en décembre.
Nous prenons acte des nouvelles mesures annoncées par le Secrétaire général de la région académique pour la constitution de la carte des formations de septembre 2022 : un groupe de travail en mai 2021 avant le dépôt des dossiers et un groupe de travail avant le CREFOP de décembre 2021. Pour siéger valablement, les représentants des personnels doivent pouvoir bénéficier de documents complets et en particulier des dossiers d’ouverture non retenus. Par ailleurs, les chefs d’établissement ne peuvent pas être les seuls interlocuteurs pour l’élaboration de la carte des formations puisqu’elle engage la communauté éducative de chaque établissement.
L’étude de la carte des formations de la formation initiale sous statut scolaire est une nécessité au service d’une politique volontariste de développement de la formation des jeunes, pour répondre aux besoins en formation du tissu économique.
Avec la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, la libéralisation du marché de l’apprentissage a permis l’ouverture de nombreux CFA privés, et en particulier dans la région Hauts-de-France. Pendant cette crise, le modèle de l’apprentissage a été interrogé et mis en difficulté : l’apprentissage ne peut se développer que si la conjoncture économique est florissante et si les entreprises sont en capacité de recruter. Sans les aides financières de l’État et la possibilité de commencer l’apprentissage pendant 6 mois sans avoir signé de contrat avec une entreprise, le modèle de développement de cette formation se serait effondré dans les CFA privés. Pendant ce temps, l’Éducation nationale a assumé sa part du travail et les enseignants ont même assuré le suivi des PFMP ( en CAP et en Bac pro) ainsi que l’enseignement des élèves n’ayant pas de lieu de stage dans les LP, la formation à distance sans dotation de matériel informatique et sans aucune compensation. Pour nous, la prime de 150 € réservé à certains enseignants prévue en janvier 2021 et annoncée pour février, est indigente au regard des besoins. Le Parisien du 9 février chiffrait le coût du travail à domicile à 174 euros par mois : seront ils un jour compensés ?
Un autre point mérite aussi d’être mis en évidence par rapport aux formations professionnelles : les organismes privés de formations ont pu avoir recours au chômage partiel de leurs salariés, ce qui de ce fait, a transféré le coût du travail vers l’État et l’ensemble de la population. Par contre, les CFA publics ont continué à payer le salaire complet de leurs permanents, un point positif pour les personnels. Les CFA publics et les GRETA n’ont pas d’autres recettes que celles reçues des formations dispensées. Dans le milieu concurrentiel de la formation professionnelle, cette distorsion de concurrence au détriment du public n’a pas été compensée par l’État et c’est donc leurs capacités à perdurer et à investir qui sont interrogées. Ainsi, le Service public d’Éducation est sacrifié au profit de la formation professionnelle privée ; et la logique de partenariat, pratique que nous retrouvons dans le Campus des métiers, se fait toujours au détriment du Service Public. Ces collaborations public-privé donnent la respectabilité de l’Éducation nationale à des formations privées payantes.
La FSU enfin reste opposée au développement de l’apprentissage avant 18 ans. Et les questions que nous avions soulevées avec le développement de l’apprentissage restent d’actualité : Qu’en est-il de la reproduction sociale de l’apprentissage ? Qu’en est-il de la répartition genrée des métiers, accentuée par cette formation ? Qu’en est-il des jeunes exclus de l’apprentissage, qu’ils soient issus des quartiers de milieux défavorisés ou de milieux ruraux ?
Dans le système concurrentiel de la formation professionnelle, système instauré par l’État, le Service public d’Éducation ne se bat pas avec les mêmes armes, contraint par des moyens limités et souffrant d’un sous-investissement chronique. La FSU exige une autre politique pour la formation professionnelle au service de tous les jeunes.